Ma fille est un poête...

Depuis que je retravaille, nous avons refait une répartition des tâches avec Laurent.
Le matin, chacun de nous emmène une des filles : qui à l'école, qui à la garderie.
Et puis, pour préserver nos petites têtes blondes, et éviter les jalousies, nous alternons.
En ce moment, c'est moi qui emmène Clara à l'école. Nous avons la chance d'habiter tout près, ce qui nous fait une petite balade le matin. C'est en général un moment privilégié, car Clara a l'estomac plein, a mis une jolie robe (rose, qui tourne "la robe de princesse"), s'est maquillée (bah oui, je suis déjà obligée de partager mon pinceau de blush...), et elle est donc d'excellente humeur et est toute disposée à me faire la conversation.
En général, nous parlons du déroulement de la journée à venir, de ses activités de la veille, de sa copine Raïssa, du fait qu'Anaïs n'a pas encore assez de cheveux pour faire des tresses... Bref tout un tas de sujets de la plus haute importance. Et puis, régulièrement, lorsque je lui tends la main pour traverser la route par exemple, elle tend les deux bras devant elle, me regarde, fronce les sourcils, et me répond très sérieusement "mais maman, je peux pas... tu vois bien que je tiens mes chiens!!". "Ah oui..." je réponds abasourdie. Tout aussi sérieusement, elle me tend gentiment ses deux mains "tiens maman, tu peux les prendre si tu veux".
Impassible, je prends les deux chiens invisibles par la laisse, "attention de ne pas marcher sur leurs pattes maman!". "Ah oui, tu as raison je vais faire attention!".
Je ne vous cache pas que j'ai eu une petite inquiétude au début... Mais finalement, j'ai repensé à un petit monsieur qui est bien connu à Honfleur : le Poête Moineau... Peut-être certains d'entre vous le connaissent, c'est LE poête officiel de cette ville. A chaque fois que je suis allée au restaurant sur le port, je le voyais débarquer, petit monsieur tout maigre, qui avait l'air tellement âgé, que l'on ne lui donnait plus d'âge...Toujours avec une petite écharpe autour du cou quel que soit le temps, il rentrait dans le restaurant, et passait à chaque table pour déposer... "un petit lapin bleu invisible".
Bon il déposait aussi un livre de recueil de poêmes, dont le prix était bien visible lui, et repartait en déclamant quelques verts de son crû.
Je crois qu'il faut que je me fasse à cette idée, ma fille est elle aussi un poête moineau...